L’Allemagne se prépare à la plus longue grève des conducteurs de train (AFP)

L’Allemagne s’apprête à vivre à partir de mercredi une grève de six jours des conducteurs de train, la plus longue jamais menée, nouvelle péripétie d’un conflit social sur les salaires et le temps de travail qui s’enlise.

Le syndicat des conducteurs de locomotives GDL a appelé lundi à ce nouveau mouvement, le quatrième depuis novembre 2023, sur fond de négociations bloquées avec l’opérateur public Deutsche Bahn (DB).

L’appel à la grève intervient moins de dix jours après une précédent arrêt de travail de trois jours qui avait paralysé le trafic dans la première économie européenne.

Dans le transport de voyageurs, les conducteurs cesseront le travail mercredi à 02h00 (01h00 GMT). Dans le transport de marchandises, la grève débutera mardi à 18h00 (17h00 GMT), a indiqué GDL. Le mouvement doit prendre fin lundi 29 janvier à 18h00 (17h00 GMT).

Le syndicat, minoritaire au sein de la compagnie de quelque 211.000 salariés, reproche à la DB de « poursuivre sans relâche sa politique de refus et de confrontation ». L’opérateur ferroviaire public l’accuse d’« agir de manière absolument irresponsable » avec cette nouvelle grève.

Selon la Deutsche Bahn, il s’agira de la plus longue grève des conducteurs de trains en Allemagne, battant un précédent record de mai 2015.

Outre des hausses de salaires pour compenser l’inflation, GDL revendique également un passage à la semaine de 35 heures sur quatre jours, contre 38 heures hebdomadaires actuellement.

La compagnie publique, qui avait déjà proposé une hausse de salaires de 11% et une prime inflation, a présenté une nouvelle offre la semaine dernière rendant possible un passage à 37 heures hebdomadaires pour le même salaire – ou bien une augmentation de salaire supplémentaire de 2,7% pour ceux qui garderaient le même volume horaire.

« La DB mise sur le compromis, le GDL aggrave démesurément le conflit », a dénoncé un porte-parole de la compagnie de chemins de fer.

L’entreprise dit s’attendre à ce que la grève de cette semaine ait « à nouveau un impact massif » sur le trafic.

– Conflits sociaux –

La Deutsche Bahn dessert d’importants axes européens (nord-sud et est-ouest) et les perturbations du trafic de marchandises risquent de porter un nouveau coup à l’économie allemande en difficulté.

Le ministre des Transports, Volker Wissing, a dit n’avoir « aucune compréhension » pour l’attitude du syndicat, s’inquiétant du caractère « de plus en plus destructeur » des pourparlers entre GDL et la DB.

Le syndicat ne reviendra à la table des négociations que si l’entreprise accepte de discuter de « tous les points », en particulier une « réduction obligatoire du temps de travail hebdomadaire », a répliqué Claus Weselsky, président de GDL.

Une semaine de 35 heures et une augmentation des salaires sont nécessaires pour rendre le métier de conducteur de train « plus attractif » pour les jeunes et remédier à la pénurie persistante de travailleurs qualifiés, a-t-il affirmé lors d’une conférence de presse.

L’opérateur ferroviaire rejette la revendication des 35 heures sur quatre jours dont le coût est jugé insupportable pour le groupe déjà fortement endetté et qui doit faire face à des investissements massifs.

Avec le syndicat majoritaire EVG, qui représente quelque 180.000 agents dans les autres métiers du ferroviaire, la Deutsche Bahn avait conclu fin août un accord sur les salaires, après plusieurs arrêts de travail du personnel.

L’Allemagne, régulièrement citée en exemple pour la qualité de son dialogue social, a connu récemment une multiplication des conflits sociaux. D’importantes branches professionnelles de l’industrie et des services ont mené des négociations salariales tendues dans un contexte de hausses des prix qui entament le pouvoir d’achat des salariés.

Ces mouvements sociaux fragilisent aussi la coalition gouvernementale au pouvoir dirigée par le chancelier social-démocrate Olaf Scholz, aux prises avec une impopularité record.

Publié sur mediapart