Les comités de base s’organisent contre l’appareil syndical au Québec

Plus d’un demi-million de travailleurs du secteur public au Québec sont en grève depuis lundi, après que les infirmières et les aides-soignantes représentées par la Fédération interprofessionnelle de la santé du Québec (FIQ) ont entamé une grève de quatre jours. Elles ont rejoint les 425.000 employés des secteurs de l’éducation, de la santé et d’autres secteurs publics de l’alliance syndicale du Front commun qui sont en grève depuis vendredi, et les 65.000 enseignants de la Fédération autonome de l’enseignement (FAE), qui sont en grève illimitée depuis le 23 novembre.

Alors que la bureaucratie syndicale est déterminée à mettre fin à la grève dès que possible et à accepter un accord de capitulation avec le gouvernement de droite de la Coalition Avenir Québec (CAQ), une réunion de travailleurs du secteur public en grève tenue dimanche a souligné que le sentiment parmi la base est en faveur d’un élargissement de la lutte pour obtenir les revendications des travailleurs.

La réunion avait été convoquée par le groupe Facebook «Travailleurs du secteur public en grève» et le World Socialist Web Site. Des travailleurs en grève des secteurs de l’éducation et de la santé y ont participé et ont mené une discussion animée sur les questions politiques cruciales auxquelles sont confrontés les grévistes. Après une discussion approfondie de plus d’une heure, l’assemblée a voté à une écrasante majorité en faveur de la résolution suivante :

Cette réunion des travailleurs du secteur public du Québec exhorte nos collègues à se joindre à nous pour que nous prenions la direction de la lutte afin d’obtenir des augmentations salariales qui dépassent l’inflation, de mettre fin aux conditions de travail pénibles et de défendre les soins de santé, l’éducation et les autres services publics vitaux.

Si nous ne le faisons pas, les appareils syndicaux pro-capitalistes saboteront notre lutte, que ce soit en négociant des conventions collectives au rabais ou en se soumettant à une loi spéciale de retour au travail.

Le gouvernement de la CAQ a l’appui de l’élite capitaliste du Québec et du Canada pour démanteler les services publics et s’attaquer à nos conditions de travail. Le premier ministre Legault ne reculera devant rien pour imposer son programme anti-travailleur, y compris en criminalisant notre lutte au moyen d’une loi spéciale anti-grève.

Par conséquent, cette réunion décide de fonder dans les prochains jours un Comité de base de coordination des travailleurs du secteur public. Ce comité sera le fer de lance de la lutte pour la création de comités de base dans chaque hôpital, école et autre lieu de travail, politiquement et organisationnellement indépendants des bureaucrates syndicaux corporatistes. Ces comités seront les instruments qui nous permettront de 1) rallier l’opposition à la tentative des syndicats de mettre fin à notre lutte et d’imposer des conventions collectives remplies de reculs ; 2) organiser une grève générale unifiée dans le secteur public en faisant fi de ce que nous dictent les dirigeants syndicaux ; 3) rallier l’appui au Québec et dans tout le Canada en faisant de notre grève le fer de lance d’une contre-offensive de la classe ouvrière pour défendre les droits des travailleurs et les services publics et s’opposer aux lois anti-grèves et au détournement massif des ressources sociales pour la guerre ; et 4) se préparer à défier toute loi anti-grève.

Le rapport principal de la réunion a été présenté par Laurent Lafrance, un éducateur spécialisé en grève et correspondant régulier du WSWS. Lafrance a souligné dans son rapport que les travailleurs du secteur public sont confrontés à une lutte politique contre le gouvernement de la CAQ, qui met en œuvre le programme de guerre de classe de l’ensemble de l’élite dirigeante canadienne en imposant l’austérité et la privatisation. Il a également replacé la grève du secteur public québécois dans son contexte international, notant la résurgence des luttes de la classe ouvrière dans le monde entier. Enfin, il a souligné que la grève est à la croisée des chemins, son succès dépendant de l’initiative de la base pour retirer la lutte des mains des bureaucraties syndicales privilégiées et pro-capitalistes, qui souhaitent préserver leurs liens corporatistes étroits avec le gouvernement de la CAQ, les grandes entreprises et l’État en imposant une capitulation aux travailleurs.

 

Extrait de l’article paru le 12/12 sur le site du WSWS.